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Un foyer et un téléphone intelligent
30 juin 2020
Pouvez-vous vous imaginer une quarantaine sans téléphone intelligent? Dès le début de la pandémie de COVID-19 et l’entrée en vigueur des ordonnances d’éloignement physique et d’auto-isolement associées, la succursale d’Ottawa de l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM Ottawa) a accordé une très grande priorité aux contacts numériques avec ses clients et les clients de ses organismes partenaires. Mais lorsque de nombreux clients vivent dans l’itinérance chronique ou la pauvreté, leur donner accès à ce moyen crucial pour le maintien des liens sociaux exige de l’ingéniosité. C’est pour cette raison que l’équipe de direction de l’organisme a rapidement pris la décision d’acheter des téléphones intelligents et des forfaits de données afin de les distribuer aux clients les plus marginalisés.
En un clin d’œil
Pendant son enfance dans les Maritimes, James avait un mode de vie en majeure partie décent.
Il avait des difficultés d’apprentissage qui nuisaient à sa concentration en classe et un trouble de la parole qui attirait sur lui l’attention des intimidateurs, mais somme toute, James estime que son enfance n’a pas été si terrible.
Adulte, il a été beaucoup moins chanceux. Il s’est marié, mais son mariage était compliqué parce que sa famille n’a jamais vraiment accepté sa femme comme belle-fille, donc la relation n’a pas fonctionné. Lorsque la mère de James est tombée malade et est décédée, il s’est retrouvé seul et s’est tourné vers la drogue, qui a contrôlé sa vie pendant un certain temps.
La ville où il vivait ne lui convenait pas : elle lui rappelait trop de souvenirs. À la fin de la quarantaine, James a fait le grand saut et a déménagé à Ottawa. Tout allait bien pour lui au début dans la capitale nationale; il s’est aussitôt trouvé un emploi, mais les choses se sont détériorées lorsque cela n’a pas fonctionné.
Dormir d’un seul œil
D’une chose à l’autre, James s’est retrouvé en situation d’itinérance chronique. Il n’avait pas l’intention de rester longtemps au refuge, mais c’est ce qui s’est passé.
James était habitué à l’indépendance avant de vivre au refuge. Simplement en passant la porte pour la première fois, il a découvert une ambiance qui ne ressemblait à rien de ce qu’il connaissait. Il s’est retrouvé à vivre dans un espace restreint, où il devait dormir d’un seul œil.
Ce mode de vie a rendu James paranoïaque. Par exemple, il devait littéralement engloutir chacun de ses repas parce que s’il regardait ailleurs quelques secondes, quelqu’un risquait de vider son assiette.
James est devenu institutionnalisé. Il devait manger et aller au lit à heure fixe chaque jour, tout en se méfiant continuellement des autres. La nourriture était bonne, mais étant donné la grande demande, les portions n’étaient pas suffisantes.
James souffrait de dépression et d’anxiété, et sa santé physique se détériorait. Les employés du refuge ont été très bons avec lui. Ils ont tout fait pour l’aider, mais il avait besoin de plus de soutien parce qu’il s’efforçait de trouver un logement et que cela ne fonctionnait pas. Un jour où il se trouvait à l’extérieur du refuge, James a entendu un homme parler avec un employé de l’ACSM (Brendon, de l’équipe d’intervention en logement) et, lorsqu’il en a eu l’occasion, il l’a amicalement abordé.
« Il était en train de monter dans sa voiture, raconte James. Je me suis approché de lui et je me suis présenté. J’ai dit : “Désolé de vous déranger, mais pourriez-vous m’en dire plus sur votre organisme?”… et c’est là que tout a commencé. »
En fait, James connaissait déjà l’ACSM Ottawa et il était sur la liste d’attente. Une semaine après s’être croisés devant le refuge, James a été associé avec Brendon – une merveilleuse coïncidence du point de vue de James parce que le courant avait bien passé entre eux lors de cette première rencontre.
Un endroit bien à lui
Avec le soutien de Brendon et l’aide de l’équipe d’intervention en logement de l’ACSM Ottawa, James a trouvé un endroit bien à lui – une tournure plutôt heureuse qui le deviendrait encore plus avec l’arrivée de la pandémie de COVID-19.
Maintenant, James dit qu’il dort les deux yeux fermés. C’est agréable de ne pas avoir à dormir avec ses objets de valeur sur soi – il savoure le fait de pouvoir laisser quelque chose sur la table et de le retrouver là quand il revient.
James n’est plus constamment sur ses gardes, et sa consommation de substances a beaucoup diminué. Même s’il avoue parfois se remettre en question – deux années de vie réglée au quart de tour dans un refuge ont marqué son esprit, – il s’adapte bien et il a appris à connaître ses voisins.
Mais depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance d’auto-isolement, il ne fait aucun doute que les journées sont longues lorsqu’on vit seul.
Avoir un téléphone intelligent est un droit
Heureusement, Brendon a été informé que l’ACSM Ottawa fournirait des téléphones intelligents à ses clients dans le besoin. Dès que Brendon a mis la main sur un des téléphones que son supérieur avait mis de côté, il s’est dépêché de le livrer (en toute sécurité) à James.
Armé d’un téléphone intelligent et d’un forfait de données, James peut appeler Brendon et lui parler sans obstacle. Il peut parler à ses amis et reprendre contact avec sa famille. Il peut gérer ses problèmes de santé physique grâce à des suivis téléphoniques réguliers avec sa clinique. Il télécharge des applications pour accroître son bien-être et développer son intuition et sa créativité. Le téléphone a également offert à James le divertissement que nous sommes nombreux à tenir pour acquis.
« James a changé du tout au tout depuis qu’il a trouvé un logement, raconte Brendon. Au refuge, il était en mode survie. Maintenant, il est intégré à la société et il peut rester intégré. »
James a accompli beaucoup de choses depuis son arrivée à Ottawa il y a environ deux ans. Le parcours qui l’a mené à trouver un foyer bien à lui est le résultat de beaucoup d’efforts et de dévouement. Dorénavant, le téléphone intelligent et les liens sociaux qu’il apporte serviront uniquement à propulser James sur la voie du rétablissement.
À l’ACSM Ottawa, nous croyons que tous ont le droit d’entretenir des liens sociaux significatifs. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, notre organisme a distribué 150 téléphones, 5 ordinateurs portables, 5 téléviseurs et quelques radios portatives à nos clients (à ce jour).
Nous continuerons de défendre le droit à la parité technologique et de déployer un maximum d’efforts dans ce but durant la pandémie de COVID-19 et au-delà.