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Amener le point de vue des pairs au conseil d’administration
5 novembre 2024
La nouvelle vice-présidente de l’ACSM Ottawa se fait la porte-parole des services qui sauvent des vies – d’après sa propre expérience
Un visage familier
Lynne Vail n’allait pas bien et elle vivait énormément de stress. Elle se rendait souvent à l’urgence et elle était souvent hospitalisée. Lors d’une de ses hospitalisations, elle a reçu un appel d’un travailleur de l’ACSM. Lynne a confondu l’acronyme anglais, CMHA, avec CMHC, l’acronyme anglais de la Société canadienne d’hypothèques et de logement.
« Je me suis dit, “Est-ce que c’est en rapport avec mon hypothèque?”, se souvient-elle. J’étais très malade à cette époque, et en arrêt de travail. »
Bien que l’on confonde souvent les acronymes CMHA et CMHC, ces deux organisations sont plutôt différentes. La succursale d’Ottawa de l’ACSM – l’Association canadienne pour la santé mentale, aussi connue sous le nom d’ACSM Ottawa – offre des services communautaires de gestion de cas en santé mentale (entre autres programmes) aux personnes admissibles d’Ottawa et des environs.
Dans ce cas, l’appel provenait d’un travailleur du programme Visages familiers de la succursale, qui vient en aide à des personnes comme Lynne qui se rendent souvent à l’urgence dans les hôpitaux de la région pour des préoccupations de santé mentale ou des troubles d’usage de substances.
Voici comment cela fonctionne : Lorsqu’une personne s’est rendue plusieurs fois à l’urgence d’un hôpital pour des préoccupations de santé mentale ou d’usage de substances au cours d’une période donnée, une « alerte électronique » est automatiquement envoyée à l’équipe de navigation dans le système du programme Visages familiers de l’ACSM Ottawa, qui prend contact avec la personne pour lui offrir des services. Les partenaires du programme comprennent l’Hôpital d’Ottawa, l’Hôpital Queensway Carleton et l’Hôpital Montfort.
Ne sachant pas trop à quoi s’attendre, Lynne a accepté l’offre de services de l’ACSM Ottawa. Un peu plus de dix ans plus tard, elle était élue vice-présidente du très estimé conseil d’administration de la succursale.
Mais comment en est-elle arrivée là ?
Des services qui sauvent des vies
« Je m’entendais très bien avec ma première travailleuse, raconte Lynne. Elle m’a aidée à me remettre sur pied et chaque fois que je retombais, elle était là pour me faire remonter la pente – pour m’aider à aller mieux et à trouver la stabilité. »
Après presque deux ans comme usagère des services de navigation dans le système, Lynne avait toujours besoin d’aide, donc elle a été jumelée à un nouveau gestionnaire de cas pour un suivi à plus long terme. Le nouveau gestionnaire de cas lui rendait visite chaque semaine et l’aidait à identifier ses forces et ses objectifs, et à combler ses besoins.
De son point de vue en tant que cliente, Lynne estime que la transition a été fluide; il n’y avait pas de différence significative entre le programme Visages familiers et les services de gestion de cas.
Elle avait d’importantes craintes à propos de sa santé physique à ce moment-là, et son travailleur était à ses côtés pour l’aider à les surmonter. Lynne a également participé à certains autres programmes offerts aux clients de l’ACSM Ottawa, comme le programme de thérapie comportementale dialectique (TCD), un type de thérapie par la conversation qui aide les gens à gérer les émotions intenses.
« Le programme de TCD m’a sauvé la vie », mentionne Lynne, précisant que la contribution à la société est un élément important du programme.
En plus de son bénévolat auprès de personnes âgées – une passion pour Lynne –, elle a décidé d’explorer les possibilités de bénévolat à l’ACSM Ottawa.
Elle est arrivée au bon moment. À cette époque, le Conseil consultatif sur l’engagement des pairs (CCEP) prenait forme, et elle allait jouer un rôle crucial dans sa mise sur pied et son intégration dans le tissu de la succursale.
Une place à la table
La gestionnaire de programme Jacalyn Ball a communiqué avec Lynne pour l’informer que la succursale créait un nouveau comité de pairs – des personnes ayant une expérience vécue – qui avaient une connaissance directe du fonctionnement de l’ACSM Ottawa du point de vue des clients, et lui a demandé si elle souhaitait en faire partie. Elle se joindrait à Jacalyn elle-même, à Cecil et à Jen (qui étaient alors pairs accompagnatrices) ainsi qu’à d’autres clients qui souhaitaient donner au suivant et partager leur expertise afin d’améliorer les services.
C’est ainsi que le CCEP s’est formé.
La mission du CCEP était d’intégrer la voix de l’expérience vécue dans les pratiques opérationnelles de l’ACSM Ottawa; d’améliorer la qualité, la sécurité et les retombées de ses programmes et services. C’est dans cet esprit que Lynne, Jacalyn et le reste de l’équipe ont établi le mode de fonctionnement du conseil.
Il fallait partir sur de bonnes bases et s’assurer que tout le monde était entendu tout en respectant les normes de l’organisation. Lynne explique que les premiers projets étaient ambitieux et qu’ils ne se sont pas réalisés.
En rétrospective, ces projets étaient essentiellement des exercices de consolidation d’équipe.
Et ils ont fonctionné.
« Ces projets ont rapproché les membres du CCEP, dit Lynne, et les ont motivés. Il y avait un bon degré d’engagement au sein du personnel et de la direction; ils s’impliquaient. Ils venaient régulièrement aux réunions. »
Au tout début, les membres du personnel écoutaient la rétroaction et les plaintes que lui transmettait le CCEP, puis donnaient leur point de vue en tant que travailleurs de première ligne. On faisait alors un remue-méninges pour trouver des solutions. Jacalyn soumettait ensuite les idées à l’équipe de direction et à ses groupes de ressources.
« Et effectivement, dit Lynne, nous avons vu les choses changer progressivement. »
À titre d’exemple, Lynne cite les changements qui ont été apportés à certains des formulaires que les clients remplissent lors de leur admission ou durant leur prise en charge. Le CCEP révisait un formulaire utilisé par le personnel de première ligne, faisait des commentaires et expliquait ce qui ne fonctionnait pas, puis quelques mois plus tard, le formulaire revenait modifié.
C’était super.
« Nous avons vu des changements concrets s’opérer grâce à l’expérience des pairs », poursuit Lynne.
Le directeur général de la succursale, Tim Simboli à l’époque, a commencé à assister aux réunions, ce qui a donné encore plus de crédibilité au CCEP, selon Lynne. Lynne appréciait les interventions de Tim. Il a fait voir au comité le contexte élargi dans lequel la succursale travaillait, ce qui se passait au niveau provincial ou municipal et du côté des partenaires et des bailleurs de fonds.
« Cela nous a rendus plus forts », estime Lynne.
Avec le temps, le CCEP s’est agrandi à mesure qu’un nombre croissant de clients et de proches se sont joints au groupe. Des employés de première ligne et quelques membres de la direction sont devenus officiellement membres du CCEP.
Les années ont passé et alors que le CCEP consolidait sa réputation en tant que source de conseils avisés sur l’amélioration de la qualité, il a été appelé à participer aux dizaines de recherches et d’évaluations menées par des étudiants de l’Université d’Ottawa et de l’Université Carleton avec le personnel, l’équipe de direction et les clients de l’ACSM Ottawa, une collaboration dont Lynne était très fière.
Un autre exemple de l’influence du CCEP : le déménagement du siège social de l’ACSM Ottawa dans un édifice permanent situé au 311, avenue McArthur dans Vanier. Au moment d’acquérir et d’aménager le nouvel édifice, la direction de la succursale a expliqué les paramètres et les options au CCEP, qui s’est ensuite concerté pour déterminer ce qui devrait s’y trouver – ce qu’il considérait comme important à partir des plans de l’architecte –, et ses commentaires ont été intégrés aux plans définitifs.
Lors du dévoilement de l’édifice rénové, il était clair que les éléments recommandés par le CCEP étaient là. Lynne mentionne que de nombreuses caractéristiques d’accessibilité étaient là grâce à l’influence du CCEP.
« Les plans prévoyaient aussi de petits détails qui faisaient une grosse différence, explique-t-elle. Nous avons même eu notre mot à dire sur les couleurs de peinture qui ont été utilisées. »
Depuis sa formation, le CCEP joue également un rôle critique dans le processus d’accréditation, une évaluation menée par un organisme indépendant qui consiste en un examen exhaustif et objectif d’une organisation donnée et de ses pratiques, ses employés et ses opérations. Dès le début, le CCEP a été intégré officiellement au processus, fournissant aux évaluateurs le point de vue des clients sur les programmes et les services reçus et sur la manière dont la succursale fonctionne.
« C’est vraiment un bon coup de l’ACSM Ottawa, affirme Lynne. Le CCEP est traité comme un égal. Par exemple, les pairs font toujours partie du processus d’entrevue pour les ouvertures de poste. Il y a un pair dans le comité de sélection de chaque candidat qui passe les portes de la succursale. »
Le passage au conseil d’administration
Le conseil d’administration bénévole de l’ACSM Ottawa est responsable d’établir l’orientation et les objectifs stratégiques de l’organisation, de déterminer les politiques et pratiques qui gouvernent ses actions et de superviser l’utilisation des ressources de l’organisation pour veiller à ce qu’elle atteigne ses objectifs. Il se compose d’un groupe de personnes représentant une diversité de professions, de disciplines et d’expériences.
Lynne a remarqué qu’une autre personne ayant une expérience vécue, Claude Lurette, siégeait au conseil d’administration et à plusieurs comités. Cela l’a inspirée de voir les possibilités d’intégration significative entre le CCEP et le conseil d’administration.
« Et voilà que Claude, qui parle ouvertement de son expérience, siégeait au conseil d’administration, poursuit-elle. Je me suis dit, “Eh bien, si une personne ayant une expérience vécue peut siéger au CA, à la prochaine ouverture de poste, je regarderai cela.” »
L’année suivante, elle apprenait que le conseil d’administration cherchait de nouveaux membres ayant de l’expérience dans le domaine des politiques. Cela tombait bien, car Lynne détient une maîtrise ès arts en politiques et administration publiques de l’Université Concordia (et un baccalauréat ès arts avec spécialisation de l’Université Brock).
Sur le plan professionnel, Lynne a également occupé plusieurs postes en communications pour la fonction publique fédérale dans les domaines du changement climatique et de la salubrité alimentaire. Convaincue de l’importance d’une bonne communication, elle croyait aussi pouvoir contribuer à améliorer la communication au sein du conseil d’administration et de l’organisation en général.
Elle a donc soumis sa candidature. La pandémie de COVID-19 était à son apogée – c’était autour d’avril 2020, d’après Lynne – et l’entrevue s’est déroulée au téléphone.
« C’était un peu bizarre », avoue-t-elle, mais cela s’est bien passé.
Quand elle a appris que sa candidature était retenue, elle était ravie. Elle a assisté à sa première réunion au printemps de cette même année.
« Je ne suis pas arrivée là les mains vides, explique-t-elle. J’avais déjà assisté à plusieurs réunions du CA à titre de membre du CCEP. J’avais participé à des séances de réflexion et de planification stratégique. J’avais parlé de mon expérience de la TCD lors de réunions du CA, alors que j’étais là pour parler du CCEP. »
Avant qu’elle ait eu la chance de remercier Claude d’être un exemple à suivre et de lui avoir donné le courage de poser sa candidature, il avait démissionné du conseil d’administration. Elle savait qu’elle devait perpétuer son héritage.
« J’essaie d’amener le point de vue des clients au CA, explique-t-elle. Quand je prends des décisions, je me demande, “Comment est-ce que je me sentirais en tant que cliente?” »
Lorsqu’on lui parle de ses bons coups, elle répond toujours que c’est le CCEP qui en bénéficie. Son rôle au conseil d’administration est une grande victoire pour le CCEP, souligne-t-elle.
Peu après s’être jointe au conseil d’administration, Lynne a démissionné du CCEP puisqu’elle estimait que maintenant qu’elle n’était plus usagère des services, elle ne faisait plus partie des pairs et elle ne pouvait plus exprimer efficacement cette voix. Ses efforts auraient plus de poids au sein du conseil d’administration.
« Quand on est malade aussi longtemps, on cesse de croire en ses habiletés, confie-t-elle. Le CCEP m’a donné le courage de voir que je peux faire partie d’une équipe multidisciplinaire. Je ne fais pas qu’utiliser les ressources, je peux aussi y contribuer. »
« Et quand on est malade aussi longtemps, poursuit-elle, on commence à se voir comme une personne malade – et on ne voit rien de plus. On a une vision étroite de soi-même. On se sent exclus de la société. Mon travail au sein du CCEP – et maintenant au sein du CA – m’aide à me réintégrer à la société. »
La plus grande victoire de Lynne au sein du CA à ce jour
En tant que membre active et impliquée du conseil d’administration, Lynne siège au comité de l’éducation et à des comités ponctuels, comme le groupe d’accréditation. Elle faisait aussi partie du groupe chargé de choisir un nouveau directeur général, qui est à l’origine de l’embauche de Susan Farrell en 2023.
Si on lui demandait de nommer sa plus grande victoire à ce jour en tant que membre du conseil d’administration de l’ACSM Ottawa, Lynne n’hésiterait pas longtemps : « Le point culminant à ce jour a été de faire partie du groupe qui a choisi Susan, affirme-t-elle. Nous sommes tellement chanceux de l’avoir. »
Lynne raconte qu’elle était nerveuse à l’idée de devoir trouver un remplaçant pour Tim Simboli, dont la retraite était imminente. Étant donné les défis et les occasions qui s’annonçaient – et qu’il fallait trouver quelqu’un qui amène un nouveau point de vue tout en ayant une profonde compréhension des soins communautaires –, Lynne et ses collègues ont accordé beaucoup d’attention à cette tâche.
« L’ACSM Ottawa est vraiment importante pour moi, affirme-t-elle. J’étais nerveuse! »
Toutefois, en voyant le calibre des candidats, elle s’est sentie quelque peu soulagée, et un CV en particulier s’est démarqué du lot. Lors de l’entrevue de Susan Farrell, Lynne a tout de suite su qu’elle et le comité avaient trouvé la nouvelle directrice de la succursale.
Un vote unanime
Seulement quatre ans après son élection au conseil d’administration de l’ACSM Ottawa, lors de l’assemblée générale annuelle à la succursale du mercredi 19 juin 2024, Lynne a été élue à l’unanimité par ses pairs au poste de vice-présidente, en même temps que le nouveau président, Peter Donnelly, cadre dirigeant aux multiples facettes et fervent défenseur de la santé mentale.
Lynne et Peter sont entrés en fonction à titre de vice-présidente et de président lorsque le conseil d’administration a recommencé à siéger après sa pause estivale, le mercredi 25 septembre en soirée.
Nabanita Giri, présidente sortante ; Peter Donnelly, président du conseil d’administration ; Lynne Vail ; et John James, ancien président du conseil d’administration.
Une vision pour l’avenir
Maintenant qu’elle est vice-présidente, Lynne a une vision de l’avenir en deux volets : au niveau micro, elle souhaite continuer de faciliter l’intégration à tous les niveaux de l’organisation, parmi les clients, les pairs et les membres de leur famille, le personnel, la direction et le conseil d’administration. Étant donné sa double expérience à titre d’usagère des services et à la table de gouvernance de l’organisation, Lynne est particulièrement qualifiée pour mener à bien cette tâche.
« En regroupant les différentes perspectives de tous, nous avons bâti une organisation plus solide afin de pouvoir réaliser notre vision macro », explique-t-elle.
Donc, au niveau macro, elle souhaite donner de la visibilité aux innombrables réussites de l’ACSM Ottawa.
« En gros, je veux que le public comprenne que les soins communautaires de santé mentale sont au centre de tout, précise-t-elle. On dirait que personne ne sait que l’intervention au niveau communautaire est la meilleure façon d’utiliser les fonds publics. »
Du côté des soins de santé, selon Lynne, il est important de tenir compte de la réalité des gens, et c’est ce que l’ACSM Ottawa et d’autres fournisseurs de services communautaires font. Elle veut que les soins communautaires – un aspect souvent mis de côté dans le système de santé – aient la place qui leur revient.
En effet, Lynne aimerait que le secteur communautaire reçoive le financement qu’il mérite pour qu’il puisse continuer de faire son travail important. Lynne ajoute qu’elle souhaite vraiment aider les gens à comprendre ce que sont les soins communautaires, à quoi ils ressemblent.
« À presque chaque réunion du CA, des membres du personnel de première ligne viennent parler de leur travail, mentionne-t-elle. Nous entendons des histoires incroyables sur la résilience dont ils font preuve tout en faisant des miracles. »
Lynne dit qu’étant donné toute la stigmatisation que vivent les gens que nous servons, et la presse négative au sujet de l’itinérance, de la maladie mentale et des dépendances, nous devons nous concentrer à lutter contre la stigmatisation, à humaniser les personnes les plus vulnérables de notre communauté et à leur donner des moyens d’aller mieux.
« Nous sauvons des vies chaque année, si ce n’est chaque jour, affirme-t-elle. Il faut faire passer ce message. »
Lynne en sait quelque chose. Sa propre vie fait partie des vies qui ont été sauvées.
En rapport :
La succursale d’Ottawa de l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM Ottawa) est un organisme communautaire indépendant à but non lucratif qui fournit des services à des personnes admissibles de la région d’Ottawa ayant des maladies mentales graves et persistantes et/ou des troubles de toxicomanie, dont de nombreuses personnes sans abri ou logées de façon précaire. L’ACSM Ottawa se consacre à promouvoir une bonne santé mentale, à élaborer et mettre en œuvre des réseaux et des services de soutien durables ainsi qu’à encourager l’action publique en vue d’améliorer les services de santé mentale et les politiques et la législation connexes à l’échelle communautaire.
Pour les demandes des médias :
Patrick Jodoin, gestionnaire, Communications et relations avec les intervenants, ACSM Ottawa
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